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Dans les précédents articles, nous avons exploré ce que sont les infrastructures et leur importance cruciale pour un avenir durable. Nous avons également abordé les approches stratégiques, comme le sovereign advisory, qui permettent de structurer et de financer ces projets. Mais qui fait quoi dans un projet d’infrastructure ? Comment se structure un projet d’infrastructure ?

Pour répondre à ces questions, reprenons l’exemple de notre village et nommons le Fènouto.

Fènouto rêve d’une route à péage pour accéder aux marchés voisins. Ce projet nous permettra de comprendre comment chaque acteur contribue, du concept initial jusqu’à l’utilisation par les usagers finaux.

Pourquoi construire une route à péage ?

Avant de plonger dans les détails du projet de Fènouto, il est important de comprendre pourquoi une entité publique pourrait vouloir construire une route à péage. Ces projets répondent souvent à plusieurs besoins :

  • Améliorer l’accessibilité : Faciliter les connexions entre les zones isolées et les centres économiques.
  • Stimuler le développement économique : Attirer les investisseurs, créer des emplois et augmenter les recettes fiscales.
  • Financer durablement l’infrastructure : Réduire la dépendance aux budgets publics grâce aux péages.
  • Réguler le trafic et améliorer la sécurité : Réduire les embouteillages et les accidents.

Plus largement, les projets d’infrastructure permettent de répondre à des enjeux stratégiques en soutenant la croissance économique, en modernisant les services publics et en améliorant la qualité de vie des populations.

1. Idéation et Pilotage : Le Rôle de l’Autorité Publique

L’initiative vient du conseil de Fènouto, qui identifie le besoin urgent d’une route moderne. Appelée « l’autorité publique » dans la terminologie des infrastructures, elle :

  • Fixe les objectifs : Améliorer les conditions de transport et encourager les échanges économiques.
  • Définit les politiques tarifaires : Propose un péage abordable pour les habitants et une tarification progressive pour les camions de transport.
  • Cherche des subventions : Sollicite des aides régionales et nationales pour compléter le financement.
  • Finance le projet : L’autorité publique peut choisir de financer totalement ou partiellement le projet en apportant des ressources propres.

2. Gestion Opérationnelle : Le Special Purpose Vehicle (SPV)

Le conseil du village crée une société de projet, baptisée Route de Fènouto S.A., qui regroupe plusieurs investisseurs et entreprises. Cette entité :

  • Rassemble les fonds : Elle obtient des investissements sous forme de dette et/ou de capital.
  • Signe les contrats avec les constructeurs et les entreprises de maintenance.
  • Gère les flux financiers : Elle collecte les péages et redistribue les revenus pour rembourser les investisseurs.

En cas de problèmes financiers, la société évite que le conseil du village ou les habitants de Fènouto soient directement exposés aux pertes.

3. Financement : Investisseurs en Dette et/ou en Capital

Pour financer la construction de la route, deux types d’investissements peuvent être mobilisés :

  • Investisseurs en dettes : Une banque régionale accorde un prêt avec un taux d’intérêt attractif. Da manière générale, les investisseurs en dette sont prioritaires dans le remboursement, mais leurs rendements sont limités.
  • Investisseurs en capitaux : Un fonds de private equity investit dans le projet, prenant un risque plus élevé en échange de rendements potentiellement importants. Ils reçoivent des dividendes.

Ces contributions permettent de couvrir les coûts initiaux de construction et de garantir la faisabilité du projet.

4. Construction et Maintenance : Les Entrepreneurs

La construction de la route est confiée à une entreprise locale de bâtiment, Assiba BTP. Cette société :

  • Réalise les travaux en respectant les spécifications techniques fournies par le SPV.
  • Emploie des habitants locaux, stimulant ainsi l’économie du village.

Une fois la route terminée, une entreprise spécialisée, Kodjo S.A., est chargée de l’entretien et de la gestion quotidienne. Elle veille à ce que la route reste sûre et praticable, et est payée via les revenus des péages.


Qui sont les actionnaires de la SPV ?

Au départ, l’actionnaire de la SPV est l’Autorité Publique. Mais cet actionnariat peut évoluer selon l’évolution du projet et sa structuration et inclure :

  • Le conseil du village : Actionnaire minoritaire (ou majoritaire), elle assure un alignement avec les intérêts locaux.
  • Le fonds de private equity : Principal apporteur de capitaux propres, il vise des rendements élevés sur son investissement.
  • Une entreprise de construction  : Actionnaire stratégique, elle contribue à la conception et la réalisation du projet.

Ces différents actionnaires apportent des ressources financières, des compétences et une expertise complémentaire, garantissant la réussite du projet.


5. Les Usagers : Les Générateurs de Revenus

Les habitants et les commerçants de Fènouto, ainsi que les entreprises de transport, utilisent la route. Leurs paiements aux postes de péage permettent de :

  • Rembourser les prêts contractés par le SPV.
  • Redistribuer les profits aux investisseurs en capital.

Pour encourager l’utilisation, le conseil du village offre des tarifs réduits aux véhicules de transports en commun et propose des exonérations pour les agriculteurs pendant la saison des récoltes.

Une Collaboration Essentielle pour le Succès

Le projet de route à péage de Fènouto illustre comment une collaboration efficace entre les autorités publiques, les investisseurs, les constructeurs et les usagers peut transformer la vie d’une communauté. Chaque acteur joue un rôle essentiel dans cette aventure, de l’idée initiale à l’entretien de l’ouvrage. Ce modèle peut inspirer d’autres villages cherchant à améliorer leurs infrastructures de manière durable et inclusive.

Si les acteurs présentés dans cet article sont communs aux projets d’infrastructure, leur rôle et leur implication sont ici spécifiques au project finance. D’autres types de financements, comme le financement public direct, les partenariats public-privé (PPP) ou les obligations infrastructurelles, existent et diffèrent par leur structure et la répartition des risques. Nous explorerons ces alternatives dans un prochain article pour vous offrir une vision complète des moyens de financer les infrastructures.